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L’économie de l’Anthropocène, comment s’en sortir?

Cette analyse n’apporte rien de nouveau qu’on ne sait pas déjà. Elle ne fait que compiler et intégrer de nombreux constats de faits qui peuvent tous se confirmer par l’observation ou la lecture de rapports et de publications sérieuses.

On observe dans les médias une augmentation récente d’articles traitant de la dégradation de la planète au point de mettre à risque la survie de l’espèce humaine. Ce phénomène sociologique a d’intéressant qu’il reflète une réalité qui est en train de se concrétiser. Le risque d’effondrement n’est plus théorique, il s’accroit et même s’amorce sous nos yeux!

L’Anthropocène a de particulier qu’il s’agit officieusement de l’ère géologique qui fait le plus consensus et se définit par les traces indélébiles que laisseront les activités de la civilisation humaine dans les couches rocheuses et dans l’atmosphère terrestre.

L’Anthropocène résulte d’un puissant déni de faits et de responsabilité collective et individuelle dans la population dite «civilisée» des pays «développés» ou en «développement» qui s’inscrit profondément dans la génétique humaine de l’évolution du cerveau, avec ses limitations cognitives et ses stratégies comportementales à prédominance irrationnelle.

Tout au long de l’histoire, l’homme patauge dans des idéologies et des croyances erronées qui comblent sans effort cognitif son besoin instinctif d’expliquer la raison des choses qui l’entourent. Les sciences arrivent bien tard dans ce parcours où le mal est implanté dans la culture populaire et sont longtemps et encore aujourd’hui réfutées parce que leurs révélations ne correspondent pas toujours aux aspirations humaines.

«La vérité peut être déroutante. Un certain travail est nécessaire pour la maîtriser. Elle peut contredire profondément nos préjugés. Elle peut ne pas être conforme à ce que nous souhaitons désespérément être vrai. Mais nos préférences ne déterminent pas ce qui est vrai.»

– Carl Sagan [https://www.csicop.org/si/show/wonder_and_skepticism]

L’organisation des sociétés humaines s’est donc toujours appuyée sur des idéologies ou des philosophies justifiant les concepts et mécanismes qui la constituent et qui ont donné naissance à ses institutions. Au détriment de l’espèce, un septième de la population humaine s’implique activement à entretenir et développer la croissance d’un système dont la conception est complètement déconnectée de l’environnement biophysique : l’économie monétaire.

À l’intérieur de cette population humaine, il n’existe pratiquement aucune activité depuis la naissance jusqu’à la mort des individus qui ne soit pas directement ou indirectement assujettie ou complètement dépendante de cette économie. Et parmi ce groupe de population, tous contribuent obligatoirement de façon volontaire ou involontaire, consciente ou non à participer et à entretenir le maintien et la croissance de cette économie.

L’adaptation de cette population à l’environnement de société qui en résulte a induit l’adoption de stratégies comportementales très spécifiques, souvent déviantes et diamétralement différentes de celles des sociétés dites «primitives». On observe ces comportements chez aucune autre forme de vie! Et le pire est qu’une proportion croissante du reste de la population humaine aspire à se «développer» pour rejoindre la grande secte de l’économie!

L’amplitude grandissante de la pression exercée par les activités humaines liées à l’économie monétaire, constitue la source et la cause directe de l’Anthropocène et des symptômes de dégradation de l’environnement biophysique qui caractérisent cette époque. Pourtant, la capacité de croissance économique est de plus en plus anémique, parce que le système commence à atteindre ses propres limites, en plus de dépasser les capacités de régénération naturelles par son rythme de «développement» insoutenable pour l’environnement biophysique.

L’observation des comportements décisionnels des politiciens, des investisseurs économiques, des acteurs financiers et industriels au cours de l’histoire récente de l’humanité révèle une dissociation complète de la réalité biophysique et une ignorance persistante de ses lois immuables et intransgressibles. Les avertissements de la science sont ignorés et bafoués de manière hypocrite au bénéfice du développement économique.

Toutes les activités humaines responsables de l’Anthropocène se déroulent comme si l’environnement biophysique n’existait pas! Pourtant, il constitue ce qui maintient la vie en fournissant les ressources naturelles nécessaires pour l’alimentation et la reproduction. Mais les fragiles équilibres entre les lois naturelles sont bousculés et transgressés par les activités de la civilisation. Et il n’existe aucune autre planète habitable pour émigrer ni aucune technologie pour l’atteindre!

Poursuivre dans cette direction de «développement» en ignorant les faits et les conséquences largement diffusées par la science et les médias, constitue un acte de déni délibéré qui affiche des caractéristiques d’un trouble du comportement addictif pour lequel il est impossible de nier qu’il mène au suicide collectif.

Tout se passe comme si le développement économique monétaire était une maladie mentale obsessionnelle compulsive qui stimule déni de la réalité factuelle, dissonances cognitives, biais cognitifs, erreurs d’heuristique de jugement, croyances et décisions erronées… Ce cycle s’est amplifié depuis le début de l’ère industrielle, tel que le démontrent les indicateurs de croissance exponentielle de la démographie, de la production et de la consommation de ressources et d’énergies.

Un des grands principes de l’évolution de Darwin s’applique particulièrement bien de manière irréfutable parce qu’il est basé sur l’observation :

«La capacité à croître d’une population est infinie, mais la capacité d’un environnement à supporter les populations est toujours finie. Les populations croissent jusqu’à ce qu’elles soient stoppées par la disponibilité décroissante des ressources dans l’environnement. La compétition pour les ressources résulte de la lutte pour l’existence. Les êtres vivants ont besoin de nourriture pour croître et se reproduire. Lorsque la nourriture est abondante, les populations d’individus croissent jusqu’à ce que leur nombre dépasse la disponibilité locale de nourriture.»

IRASD. Évolution et adaptation, Dossiers de recherche en environnement humain, 2014,

[ https://irasd.wordpress.com/dossiers/recherches/environnement-humain/theorie-de-levolution-et-principes-dadaptation/ ]

Le concept de monnaie, inventé pour les échanges en remplacement du troc, est un outil post-Néolithique conséquent de l’affranchissement de la dépendance de l’espèce humaine à la nature pour assurer sa subsistance par la chasse et la cueillette. En passant d’un mode nomade au mode sédentaire favorisé par le développement de l’agriculture, une différenciation sociale s’est imposée parmi les individus de la société.

Changement charnière qui a amené les échanges commerciaux parce que la production agricole a favorisé l’adoption de stratégies comportementales différentes de celles des chasseurs-cueilleurs. Producteurs et consommateurs ont érodé les stratégies comportementales de collaboration et de mise en commun. Le partage des efforts communs s’est transformé en commerce des biens et services individuels. Ces mutations sociales altèrent le comportement et le jugement humain par adaptation.

D’un point de vue éthologique, le capitalisme résulte et engendre un trouble comportemental exacerbé par des idéologies philosophiques et des concepts erronées, totalement déconnectées de la réalité biophysique.

La plus grande erreur philosophique de l’humanité est sans doute celle de Descartes. «Nous rendre comme maîtres et possesseurs de la nature» serait, d’après un passage du Discours de la méthode, publié par le philosophe en 1637, ce que les hommes parviendront à faire lorsqu’ils auront développé leur savoir par la connaissance de la science.

L’idéologie erronée de Descartes, «maîtres et possesseurs de la nature», est la pensée magique qui est à la base de l’ère industrielle, des fondements de l’économie et de la politique modernes qui sont responsables de la destruction de l’environnement biophysique et de la déconnexion idéologique entre les concepts et mécanismes de l’environnement de société et les lois immuables et intransgressibles de l’environnement biophysique.

Descartes est le premier à établir un lien mécaniste entre science et technique, entre la connaissance de la nature et les moyens pouvant être mis en œuvre par l’homme pour la maîtriser. Il s’agit d’une erreur d’heuristique de jugement basée sur des biais cognitifs anthropocentristes. Cette «maîtrise» devrait plutôt être une symbiose et ne peut se concrétiser sans la connaissance et le respect des lois biophysiques révélées par les sciences.

Mais la science n’est pas la certitude absolue, elle n’est qu’une des méthodes favorisant de rapprocher la connaissance d’une compréhension des mécanismes du réel. La perfection ne s’y trouve pas. L’homme ne maîtrise pas et ne maîtrisera possiblement jamais suffisamment toutes les connaissances pour transformer la nature sans risque d’effets secondaires, simplement parce que le cerveau humain, d’un point de vue évolutif, neurologique et cognitif, ne le permet pas! Au-delà d’un certain nombre de concepts ou de variables, le nombre de probabilités dépasse la capacité du cerveau humain. Et surtout parce que l’organisation sociale de la civilisation ne favorise pas le temps nécessaire pour atteindre le niveau de compréhension requis avant de commettre des décisions.

Dans l’état actuel de la civilisation, aucun chef d’État ni décideur économique ne mettra jamais en application de mesures vraiment efficaces pour limiter les activités industrielles dégradant l’environnement par surexploitation et stopper les émissions de gaz à effet de serre afin de limiter les changements climatiques parce que cela impliquerait de sacrifier les investissements et la croissance économique des états.

Aucun mouvement populaire de masse efficace n’aura lieu non plus parce que cela impliquerait pour chacun de sacrifier son confort individuel et son avenir en perdant sa sécurité financière et en limitant sa consommation au strict minimum des besoins essentiels.

Toute action pour interrompre les dommages à la planète et améliorer les chances de survie de l’espèce humaine ne peut être péniblement concrétisée autrement qu’en stoppant l’économie et en limitant les activités industrielles au strict minimum des besoins vitaux de la population qui deviendront critiques à cause des changements climatiques. Et toutes les activités humaines doivent s’insérer dans un contexte durable qui tient compte des capacités de l’environnement biophysique à les supporter, par conséquent à les limiter!

Aucune économie monétaire ne pourra tenir dans de telles conditions…

Aucun effondrement de civilisation ne peut se produire d’une cause unique…

L’enjeu et le défi sont titanesques.

Il pourrait exister d’autres solutions menant à d’autres futurs, mais il ne reste plus de temps pour trouver les chemins qui nous y mèneraient peut-être… car plus rien n’est certain dans un système fermé dont on déstabilise les équilibres naturels avec force et insistance.


2 commentaires

  1. Pierre Audette dit :

    Ça confirme bien ce que je pensais, nous sommes vraiment ce qu’on appelle une joyeuse bande de terreauphil.

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